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Navigateurs ou systèmes d’exploitation ? La crise identitaire de Chrome et Firefox

Fabrizio Ferri-Benedetti

Fabrizio Ferri-Benedetti

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Le navigateur Internet a changé. Avant, il se limitait à ouvrir des liens et gérer des favoris : maintenant il propose des applications et des comptes d’utilisateurs. Celui qui n’était qu’un simple moyen d’afficher des contenus est maintenant un vrai système d’exploitation (ou presque).

Il y a quelques années, un navigateur n’était qu’un simple lecteur d’informations. Il prenait les données d’un fichier HTML et les transformait en texte formaté et en liens. Je me souviens encore de la navigation dans les années 90 : une expérience lente et frustrante. Télécharger des images GIF était le maximum. Flash et Java ajoutaient peu à cette consommation passive d’informations.

Navigateurs ou systèmes d’exploitation ? La crise identitaire de Chrome et Firefox

VRML, le top du top de la technologie Internet dans les années 90

Aujourd’hui, le navigateur est la façade de nouveaux systèmes d’exploitation : le visage de ce que nous utiliserons demain à la place de Windows. Au lieu de se contenter du chargement de contenu, les sites Internet nous aident à créer ce contenu directement sur le navigateur, à participer aux réseaux sociaux, à partager nos pensées, à laisser une trace sur la toile.

Chrome OS, le navigateur devenu système d’exploitation (ou son interface)

La différence fondamentale entre hier et aujourd’hui réside dans le fait que ce qui était avant réalisé par un programme externe (par exemple la modification d’images) passe maintenant par le navigateur lui-même, une partie étant réalisée dans le navigateur par des machines situées à des centaines ou des milliers de kilomètres et l’autre par le navigateur avec les ressources locales.

Chrome et Firefox : des navigateurs aux systèmes d’exploitation

Les navigateurs ont changé pour s’adapter aux nouvelles technologies Internet, développées pour faciliter la création de sites Internet plus complexes. Les nouvelles connexions couplées aux nouvelles technologies et aux techniques de commerce novatrices ont donné une forte impulsion à la création d’une nouvelle génération de navigateurs.

Meebo a prouvé qu’il était possible de faire dans un navigateur ce que nous pouvions faire sur notre Bureau.

C’est justement la technologie qui se trouve derrière les applications web – JavaScript et HTML 5 – qui permet depuis des années de faire des navigateurs la partie visible, le shell, des systèmes d’exploitation. Certaines applications web n’ont rien à envier aux OS en termes de rendement et de fonctionnalités.

Chrome OS et Firefox OS sont la preuve vivante de cette transformation : leurs applications web sont des paquets dont l’exécution dépend du navigateur, ce qui permet de les faire fonctionner sur n’importe quel système sans avoir à adapter le code. Le vieux rêve des applications universelles (qu’avait déjà Java à son époque) est en train de devenir réalité grâce aux navigateurs.

Revenir en arrière n’est plus possible. Il suffit d’ouvrir Internet Explorer pour se rendre compte que le navigateur comme programme du système d’exploitation est devenu insuffisant. Un navigateur classique est incapable de transcender le système d’exploitation. C’est un labyrinthe sans fin. Les nouveaux navigateurs, en revanche, vous plongent dans un monde infini d’applications web.

Pour Windows et Mac, les navigateurs restent accessoires

Les systèmes d’exploitation classiques, comme Windows et Mac OS, continuent à prôner le modèle de l’application hors-ligne, avec des fichiers exécutables et des processus d’installation. Dans un même temps, ils cherchent à passer aux mobiles et tablettes. Pour ce faire, ils développent de plus en plus les versions mobiles (Windows Phone et iOS) et cherchent une convergence renforcée.

Mac OS X et iOS cherchent des points de convergence, mais ce n’est pas facile

Mais un système d’exploitation qui cherche à intégrer de nouvelles plateformes doit posséder du matériel compatible, ce qui limite leur portée et possibilité. Ainsi, Windows Phone, toujours plus proche de Windows, est présent sur les appareils Nokia, et iOS sur les appareils Apple. C’est également une question de marketing : l’OS fait partie du produit.

Chrome OS et Firefox OS n’ont pas ce genre de limite. La couche sous-jacente de Chrome OS et Firefox OS, celle qu’on appelle “navigateur d’exploitation”, est Linux, qui s’adapte bien sur n’importe quel appareil et qui fournit une base flexible sur laquelle se basent les nouveaux systèmes.

Nous assistons à un conflit entre les navigateurs d’une part et les systèmes d’exploitation classiques d’autre part. Les applications web du cloud contre les programmes qui peuvent fonctionner sans connexion. Chaque modèle a ses avantages et ses inconvénients, mais celui qui saura le mieux s’adapter aux dispositifs de demain et à l’ère d’Internet sera le vainqueur.

Une crise identitaire qui vient de l’ambition

Nous assistons à un conflit entre les navigateurs d’une part et les systèmes d’exploitation classiques d’autre part. Les applications web du cloud contre les programmes qui peuvent fonctionner sans connexion. Chaque modèle a ses avantages et ses inconvénients, mais celui qui saura le mieux s’adapter aux dispositifs de demain et à l’ère d’Internet sera le vainqueur.

Canary, version expérimentale de Chrome, a introduit… le bouton de recherche !

Il reste quand même des choses que les navigateurs ne font pas ou font à moitié, comme la gestion de la mémoire ou le contrôle des ressources audio et vidéo. Les extensions interfèrent parfois plus qu’elles n’aident et les plug-ins se sont transformés en point d’entrée pour des dizaines de virus dangereux.

Ajouter un gestionnaire de tâches à un navigateur ne règle pas les problèmes

Enfin, il faut prendre en compte le nombre d’interfaces des applications web, qui produise une fragmentation énorme. Utiliser la version web de Foursquare n’a rien à voir avec utiliser la version web de Flickr par exemple. Cette fragmentation est moindre lorsqu’il s’agit d’applications classiques (“natives”).

Le changement est positif, mais il ne faut pas oublier l’utilisateur

Le souhait de Google et Firefox de capturer les applications web permettra de créer une expérience unique pour l’utilisateur, mais aujourd’hui, seul un système d’exploitation classique peut garantir une cohérence maximale dans l’utilisation des applications, que ce soit en termes de standards de design ou de critères de marketing.

Pour réussir leur étrange transformation en systèmes d’exploitation, les navigateurs doivent atteindre deux objectifs : d’un côté, ils ne doivent pas oublier leur but premier – être des outils qui facilitent la consommation de contenu sur Internet, et de l’autre ils doivent concilier la liberté d’Internet avec l’expérience de l’utilisation qui doit être de qualité. Rien de plus facile.

Les navigateurs sont-ils devenus trop ambitieux ?

Article original écrit par  Softonic.com. Adapté de l’espagnol.

Fabrizio Ferri-Benedetti

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